Si je me remémore mes souvenirs Facebook d’il y a plus de deux ans, jamais je n’aurais pensé que j’aurais cheminé autant en si peu de temps, par le simple fait de changer de ville. C’est fou à quel point un simple fait hasardeux de la vie, tel que naître à un endroit en particulier, peut déterminer pas mal de paramètres sur notre humanité. Pis juste pour vous popper une statistique drette de même, y’a 10 ans de différence dans l’espérance de vie entre les gens de Westmount pis de St-Henri.
Cela fait deux ans que j’ai quitté Sherbrooke pour Montréal. À chaque fois qu’on me pose la fameuse question des gens qui font semblant de s’intéresser à la réponse, je réponds que non, je ne suis pas ici juste pour les études. Je suis ici pour y vivre aussi. Parlons sérieusement, y’a pas mal moins d’espérance d’avenir dans les autres villes québécoises.
Quand je suis arrivée ici au début, jamais je n’aurais pu penser, une seule millième de seconde, tomber dans le milieu de l’humour aussi facilement. En fait, pour faire court, c’est surtout l’humour qui est venu me chercher plus que moi je l’aurais demandé, voire même seulement imaginé. En deux ans à peine sur l’île, j’ai trouvé ma place pas mal plus qu’en 21 ans dans ma petite ville minable… euh, natale, pardon. Ça a commencé par le simple fait d’assumer l’idée d’aller voir des shows d’humour toute seule dans les bars en ne connaissant personne encore, puis maintenant… je songe même à y faire carrière !
Tout s’est fait tellement rapidement, tellement facilement. Ça a compté comme 2 ans en terme d’espace-temps, mais ça vaudrait comme 15 en temps normal… En fait, je dis le mot « normal », mais la normalité c’est tellement relatif, voire inexistant. Pis à bien y penser, le mot « temps » est tout aussi relatif, et même que des fois, je me plais à penser que le temps est une construction humaine.
Tsé, les gens virent fous le 31 au soir du Nouvel An. Soyons honnêtes… ce n’est pas le passage de 11h59 à minuit qui va faire en sorte que la vie est complètement changée. C’est les actions qu’on pose pis les décisions qu’on prend qui changent la donne, à savoir si on va passer une prochaine année de marde ou non. Le problème là-dedans, c’est que cette liberté-là qu’on a est tellement angoissante chez certains, qu’ils préfèrent rester enfermés dans un manque de contrôle sur leur vie, pour ne pas avoir à subir les conséquences d’une mauvaise décision. En revanche, c’est également la meilleure façon de subir l’ABSENCE de bonne décision. Ce qui est tout aussi dévastateur, selon moi.
Imaginez : Si j’avais décidé de rester à Sherbrooke pour y faire ma vie, tout ça aurait été complètement différent. À l’heure actuelle, je serais probablement encore en petite boule sur le plancher de ma salle de bain à me demander ce que je veux faire dans vie. Pis donc ben trouver que y’a pas mal rien d’intéressant dans les choix qui s’offrent à moi. Et ensuite de cela, vouloir aller prendre une bière avec des amis pour me changer les idées… mais me rappeler que les bars ferment câlicement tôt le dimanche.
Ce que je veux dire avec tout ça, c’est que je crois profondément que nous, les humains, sommes envahis par le temps. C’est comme si le fait de savoir que chaque moment a une fin fait en sorte qu’on a oublié la relativité du temps qui nous habite. On a oublié que c’est surtout nous le maître de nos décisions, pis que c’est ben correct de vouloir marcher moins vite que les autres une fois de temps en temps, pour profiter du temps qui passe. Je crois qu’il faut arrêter, en tant que société, de penser en fonction des cadrans qui tournent dans nos têtes pis partout autour de nous.
Comme disait une des fameuses tunes des Colocs, : « La vie c’est court, mais c’est long des p’tits bouttes ». C’est 100 fois plus important, je trouve, de faire ce qu’on aime dans la vie, que de se résigner à passer une vie longue et chiante dans un environnement qui ne nous plaît pas. C’est l’humain qui a construit les calendriers, les horloges, les minutes, les secondes et tout le reste. Les seuls vrais moyens de mesurer le temps sur lesquels on devrait se fier, c’est les jours et les changements de saison. Autrement, on se fait avaler par un désir d’efficacité, de rapidité, de tout vouloir faire, mais de le faire à moitié.
Je ne sais pas pour vous, mais je n’ai jamais vu d’animaux badtripper parce qu’ils venaient de fêter leur 40e anniversaire pis qu’ils n’avaient toujours pas de REER. La notion de temps est signe de relativité, et c’est pour cette raison que je m’amuse à penser que le temps est une construction humaine. Essayez-le, c’est bon pour la santé mentale.